Discours du payernois du dehors
Monsieur l’Abbé Président, Messieurs les membres du Conseil
Mesdames et Messieurs les invités
Et vous chers amis tireurs,
Je vous préviens, je n’en parlerai pas.
Pour commencer, je tiens à adresser mes remerciements à notre ancien Abbé Président Pierre-André de m’avoir fait l’honneur de me demander d’être votre orateur du jour. Contrairement à ceux des années précédentes, je n’ai pas eu une, mais deux années d’insomnies…
Comme les vacances sous les tropiques sont devenues inaccessibles, il m’a semblé opportun de vous ouvrir mes carnets de voyage. J’ai en effet passé 4 ans et demi à Abidjan, en Côte d’Ivoire et j’ai beaucoup voyagé dans cette région. Je voudrais vous faire part de cette expérience.
La Côte d’Ivoire, c’est l’un de ces pays côtiers du Golfe de Guinée qu’on a parfois du mal à placer. Pour y parvenir, il faut traverser le désert du Sahara et le désert du Sahel. En parlant de traversées du désert, 2 Brandons, 1 Tirage : le Payernois s’est montré résilient. Je suis fier de vous !
La population ivoirienne compte 28 millions d’individus répartis en quelques 60 ethnies différentes. La langue officielle y est le français, avec l’accent soleil, bien entendu, mais les gens y parlent également le Dioula. C’est une langue locale assez difficile à comprendre. Il y a trop de voyelles, c’est un peu le contraire du Suisse-Allemand.
L’avantage d’habiter dans un pays d’Afrique francophone, hormis la langue, c’est que vous ne vivez pas reclus, dans des quartiers de haute sécurité réservés aux expatriés. Non, nous vivions dans un quartier mélangé avec toutes les strates sociales. Lorsque vous sortez, les gens s’adressent à vous en vous disant : “Hé, le blanc !”. Je me suis toujours demandé comment ils savaient que je suis libéral.
Au même titre que “le Vieux, la Grosse, Papi, Tonton” la diversité est célébrée. Il n’y a qu’une personne à Payerne, à qui on pourrait s’adresser en disant “Hé, le noir !” sans s’attirer les foudres de la justice. Il est parmi nous, d’ailleurs. Cette petite anecdote illustre bien cette tendance à la bien-pensance très Européenne qui, à mon avis, fissure le socle de notre démocratie en limitant notre liberté d’expression.
Mais revenons à notre carnet de voyage.
Au début, lorsque nous circulions dans Abidjan, c’était avec Monsieur Gbané, notre habile relais culturel et chauffeur. Oui, un Ivoirien comme chauffeur, c’était un peu risqué, je l’avoue !
Mais Monsieur Gbané avait un avantage : il ne boit pas.
J’anticipe votre question : non ce n’est pas parce que c’est un Playmobil.
Oui, j’ai bien dit Playmobil. Pensez-y, les Playmobil ne peuvent pas boire, ils n’ont pas de coude !
Non, Monsieur Gbané est musulman. Comme la moitié des habitants de la Côte d’Ivoire.
L’autre étant chrétienne.
Donc, il me demande :
- Vous n’êtes pas Français. Vous venez d’où ?
- Je suis Suisse, je viens des Hameaux !
- Ah, ça a été colonisé par qui ?
- La Suisse n’a pas été colonisée, les Hameaux, par contre, par les Payernois !
Il y a beaucoup de choses que nous pouvons apprendre des gens d’Afrique de l’Ouest. Comme :
- La créativité et la fantaisie,
- L’improvisation
- La volonté d’entreprendre
- Et la capacité de vivre dans le moment présent : demain, c’est loin et après-demain, ça n’existe pas
La combinaison de ces différentes facultés enrichi le quotidien et souvent vous réserve des surprises.
J’ai pu observer lors de ma dernière visite dans la capitale broyarde, que certains Payernois s’étaient plutôt concentrés sur l’autre bout du spectre de ce que l’Afrique peut nous apprendre : la fameuse voiture électorale. Libre ensemble… et maintenant ? On peut dire que l’idée a à moitié fonctionné. Félicitations à l’élu d’ailleurs.
Mais moi, je sais d’où est venue l’inspiration. J’étais au Cameroun en 2018 durant l’élection de Paul Biya aux présidentielles et je les ai vues ces voitures électorales. Par contre ses arguments à lui étaient beaucoup plus convaincants : il met une mitrailleuse sur le toit du véhicule. En même temps, il est Président depuis 38 ans…
La boucle est bouclée : l’origine de l’Homme est définitivement africaine.
Blague à part, il y a tout de mêmes quelques aspects de notre vie qui m’ont manqué là-bas :
En Côte d’Ivoire j’ai côtoyé des gens à la silhouette décharnée de ceux qui ont souffert de la polio étant enfants ainsi que des gens adultes abandonnés nus au bord de la route car ils souffraient de maladies mentales.
On peut rouspéter à propos de la vaccination et chouiner à propos de notre système de santé, mais il y a des limites !
Le second point est celui-ci : Si on définit la démocratie comme l’Homme désigné par le peuple, en Afrique de l’Ouest, c’est trop souvent l’Homme qui désigne pour le peuple. Là-bas, on rencontre une société civile fracturée et des pouvoirs publics enclins à exploiter ces fractures.
La campagne pour les votations de juin a montré de telles fractures au sein de notre propre société et je pense qu’il est du devoir de chacun de faire l’effort d’aller vers l’autre afin de la préserver.
Et ceci, chers amis tireurs, commence ici, au sein de notre vénérable Société, avec mes amis les Pines-Sapins et vous autres équipes du tirage. Mais également au sein des autres société de notre belle ville. Donc la prochaine fois que vous vous ennuyez devant votre télé. Pensez-y : mes collègues de scène répètent tous les mercredis à l’ancienne chapelle du Chemin-Neuf.
Et pour celui qui ne voit même plus ça télé, derrière sa bulle, le CAB a également entraînement le mercredi soir, il faudra choisir, l’été au stade municipal et l’hiver à la salle des Rammes.
Et pour terminer, le club qui m’a fait un peu sourire : sous WWW échecs, au pluriel tiret Payerne point CH, je pensais trouver une longue liste, j’y ai trouvé :
- Quatre tours,
- Deux Rois,
- Une reine qui avait quitté le plateau,
- Et un fou
Sur ce, chers amis tireurs, je vous souhaite un bon Tirage.
Vive la Société des Tireurs à la Cible
Vive la Broye